... Pourquoi exposer ainsi la planche-contact du photographe ? Elle équivaut aux brouillons de l’écrivain, au carnet d’esquisses du peintre. Il peut sembler bizarre de la montrer. Mais songeons que toute la création moderne est exposition ou exhibition des brouillons de l’œuvre, celle-ci n’apparaissant souvent que comme la recension de ses propres possibles, l’exposé des problèmes techniques eux-mêmes de la représentation. Alors la représentation devient elle-même son propre sujet. S’opère l’éternelle et inévitable déconstruction des constructions : à la fois en nous-mêmes quand nous grandissons, et au sein des cultures quand elles mûrissent. Alors le doute, l’hésitation, et leur exposé, remplacent les certitudes de naguère. Les choix expressifs ne sont plus montrés tout faits, mais à faire. Au moins, le récepteur co-crée, coopère. Il n’assiste pas à quelque chose, il assiste celui qui crée. Et s’il n’y a pas cette assistance, si la coopération ou la synergie fait défaut, rien ne se passe. Pareillement dans le récit : on passe aujourd’hui de l’histoire elle-même à l’exposé des problèmes de la narration, du récit d’une aventure à l’aventure d’un récit.
Sans doute montrer les brouillons, les esquisses, les documents préparatoires, les carnets, etc., est rendre le public plus intelligent, puisqu’il est associé à l’acte même de création, à la fabrique ou la fabrication de l’œuvre. Mais c’est aussi le désappointer, puisqu’il aime bien être guidé, dirigé, et qu’on le tienne par la main. Rares sont ceux qui supportent ou qui aiment d’être adultes. On est déçu de voir le carrosse retransformé en citrouille, et que le prestidigitateur montre ses tours. Qui aime volontiers quand il lit un livre ou quand il regarde un tableau qu’on lui coupe le courant, et qu’on l’invite à aller réparer lui-même les plombs ? ...
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Ce passage est extrait du chapitre 8 de mon ouvrage Quand parlent les images - Méditations photographiques, publié chez BoD. Il est disponible en format papier et en format électronique (e-book).
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Le langage de l'image est celui que nous tenons en la contemplant. Sa signification est celle de notre propre discours intérieur, qu'il convient d'analyser dans tous ses procédés, ce que fait le présent ouvrage. Il est composé de méditations que l'auteur a faites sur des photographies qu'il a réalisées lui-même à partir d'un visage féminin. Ces méditations ne sont pas que didactiques. Elles incluent aussi sensibilité et rêverie. De la sorte, ce livre pourra intéresser (...)
Voici le texte complet de la quatrième de couverture :
Le langage de l'image est celui que nous tenons en la contemplant. Sa signification est celle de notre propre discours intérieur, qu'il convient d'analyser dans tous ses procédés, ce que fait le présent ouvrage.
Il est composé de méditations que l'auteur a faites sur des photographies qu'il a réalisées lui-même à partir d'un visage féminin.
Ces méditations ne sont pas que didactiques. Elles incluent aussi sensibilité et rêverie. De la sorte, ce livre pourra intéresser tous ceux qui en général aiment les images et les mots, ainsi que leur dialogue souvent très fécond.