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Le blog artistique de Michel Théron
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L'Infini des fictions

L'Infini des fictions

D.R.

L’

 

image d’un objet quelconque, d’origine humaine du moins, suffit à construire autour de lui une fiction. Le contexte supposé, le hors-champ en sont infinis. Ses propositions ont beaucoup plus de force émotionnelle que l’évocation directe d’une scène précise, par la raison que ce qu’on imagine est toujours bien supérieur à ce qu’on voit.

Il y a dans le langage une forme de métonymie, appelée métalepse, qui consiste à dire l’effet pour la cause, le conséquent pour l’antécédent. Ainsi « nous le pleurons » remplace « il est mort ». L’effet est beaucoup plus fort. En fait, le mot mort ne dit rien, mais une chaise vide dit tout.

Face à cette chaise longue, vide d’occupant sur la plage tout aussi vide, on peut se construire un infini de fictions « métaleptiques ». Cela irait de l’interrogation sur le sort de son propriétaire (Où est-il ? Va-t-il revenir ? S’est-il noyé ? etc.) à une réflexion sur le vide métaphysique, à la manière des films d’Antonioni, ou des tableaux de Chirico. L’éventail est sans limite.

Pour définir le champ de ces fictions, j’ai parlé d’objet d’origine humaine. En effet, un paysage sans trace humaine par exemple ne leur donne pas a priori autant d’aliment. Comme si la nature nue en quelque sorte résistait à notre investissement imaginaire, nous était par principe étrangère. C’est pourquoi dans les estampes chinoises ou japonaises figure souvent, insérée dans le paysage, une petite trace humaine (chaumière, barque, etc.). Il faut qu’il y ait de l’humain perceptible pour que l’Einfühlung (l’empa­thie) puisse se manifester.

Aussi bien peut-on ranger les productions artistiques en deux catégories : celles qui permettent les fictions de toute sorte, avec en elles un recours à l’humain, et celles qui leur sont étrangères : de ces dernières l’abstraction totale en peinture, est un bon exemple. C’est un art qui s’enfuit, comme dans la géométrie de Mondrian. Sans référence à l’humain, l’abstraction tourne le dos à la fiction. Et c’est peut-être à ses risques et périls.

 

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