On admettait naguère que le but de l'Art était la recherche de la Beauté, et que ses temples étaient précisément les musées des « Beaux-Arts ».
Mais aujourd’hui tout cela a bien changé. Certains « artistes » revendiquent hautement la laideur et la médiocrité de leurs créations. Ils assument par exemple totalement l’idée d’une mauvaise peinture (bad painting).
Voyez la pratique de Jean-Michel Basquiat : l’« œuvre » est volontairement bâclée et négligée, elle mêle collages, graffitis, couleurs vives, traits grossiers, publicités, etc. Mieux, l’artiste belge Jacques Lizène revendique lui-même un « art nul » et des créations lamentables et sans intérêt. On peut consulter (preuve qu’il a de l’écho) sa notice sur Wikipédia.
Sur le même site on pourra voir la longue rubrique consacrée au Museum of bad art (MOBA), ouvert récemment dans le Massachussetts.
Ce musée s’est fixé pour but de collecter et d’exposer des œuvres « trop mauvaises pour être ignorées ». Ses fondateurs disent que la collection est un hommage à la sincérité des artistes qui ont persévéré, malgré la catastrophe du résultat : « Nous sommes là pour célébrer le droit de l’artiste à l’échec glorieux ». De fait, la sélection est sévère, et neuf tableaux sur dix sont refusés, car ils ne sont pas assez laids. Le but est de désinhiber les candidats-artistes, en leur montrant ce qu’il y a de pire, pour les délivrer de la peur qu’ils pourraient avoir à s’exprimer eux-mêmes – quitte évidemment à ce qu’ils fassent la même chose que ce qu’ils voient...
Le point de départ de la collection a été une toile déchirée découverte dans une poubelle de Boston, par quelqu’un qui à l’origine voulait en récupérer seulement le cadre. La déchirure même en a fait la valeur. Autrement dit, tout peut toucher, et l’intérêt qu’on porte à quelque chose n’a aucun rapport avec sa qualité.
Lorsque Bourdieu dans La Distinction affirmait la relativité des jugements esthétiques, avait-il prévu le résultat de son entreprise de déconstruction ? Arroseur arrosé, ou pompier pyromane, est-on fondé ensuite à critiquer le nihilisme, à quoi aboutit nécessairement la mise en avant de l’échec ?
25 janvier 2018
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Pour une initiation générale aux problèmes de l'Art, vous pouvez voir mon autre ouvrage Petite initiation à l'Art :
Ce livre est une réflexion, sous forme dialoguée qui la rend plus vivante, sur les principes fondamentaux de l'Art. Chaque dialogue s'inspire d'une version différente d'une même photographie représentant une folle avoine. A la fin de chaque dialogue, un encart à visée pédagogique permet de faire le point sur ce qui a été dit, et de le résumer pour permettre de mieux en mémoriser la substance. Mais le savoir n'est rien sans la saveur. Puisse ce livre, où dialoguent (...)
Ce livre est une réflexion, sous forme dialoguée qui la rend plus vivante, sur les principes fondamentaux de l'Art. Chaque dialogue s'inspire d'une version différente d'une même photographie représentant une folle avoine. A la fin de chaque dialogue, un encart à visée pédagogique permet de faire le point sur ce qui a été dit, et de le résumer pour permettre de mieux en mémoriser la substance. Mais le savoir n'est rien sans la saveur. Puisse ce livre, où dialoguent (...)