Dans la chaleur de l'été

ertaines journées d’été dans mon Midi natal sont si étouffantes et accablantes que l’on n’y supporte pas la grande lumière du dehors, et qu’on s’en protège en rapprochant les volets. Le Temps semble suspendu. Éternité seulement troublée parfois par le vol de quelques insectes.

L’impression est celle d’une grande lassitude, d’un désir d’arrêt sur place : plus de courage à poursuivre, à découvrir quoi que ce soit, inappétence à goûter, à désirer. Le cœur a battu pour maintes choses, mais maintenant il ne bat plus. Seul souhait d’ensevelissement dans un sommeil sans fin. Une nuit libératrice victorieuse de toute lumière.

Pourtant qui nous dit que la lumière ne nous éblouirait pas encore, ne chanterait pas dans nos vies ? Pourquoi s’en protéger, alors que peut-être elle pourrait inaugurer pour nous une nouvelle aventure ? Il y a derrière ces volets, dans le jardin, cette fête de couleurs dansantes, ces fleurs dans le vent, que l’on a célébrées naguère. Cela pourrait donc être fini ? Et nous-mêmes, n’aurions-nous plus la force de remercier cette lumière pour ce qu’elle nous donne ?

Apparemment non. La gratitude nous quitte, et l’envie de l’exprimer. Nul attrait de sirènes extérieures ne saurait nous arracher à l’immobilité qui seule nous tente et nous plaît. On a assez donné. Vivement la fin ! Assurons la victoire de cette acédie, de ce Démon de Midi !

L’incendie de ce soleil zénithal nous brûle. Il nous montre le À quoi bon ? de toutes choses. Il désamorce tous nos élans, il nous fait désirer l’absence même de tout désir. Ce qui pourrait nous sauver, nous donner vie, il le détruit.

... Quand ouvrirons-nous à nouveau nos volets ?

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Cette photo et ce texte sont extraits du tome 2 de mes Méditations photographiques (BoD, éd.). Pour des renseignements sur cet ouvrage, cliquer sur l'image ci-dessous :