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Le blog artistique de Michel Théron
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Musiques

Musiques

 

 

Musiques
Il y en a que la musique fait sauter, danser, rire, chanter. Moi, elle me fait pleurer.
Jour d’été et de feria dans ma petite ville camarguaise. Toutes les fanfares s’en donnent à cœur joie. Joie dans le cœur sans doute. Mais le mien à les écouter défaille, se brise, s’ouvre et se fend.
Et pourtant il y a le soleil de mi-jour et de mi-juillet, l’ombre mouvante des platanes sur le sol, sur les êtres et les visages, vrai tableau de Renoir. Ce soir, il y aura la novillada, puis les danseuses sévillanes. Je ferai des photos. Alors ?
C’est peut-être que comme là encore je ne suis que spectateur, et pas, ou plus, acteur. Pourtant, ai-je été un jour autre chose que spectateur de ma propre vie ?
De ces musiques s’éveille le souvenir des choses passées. Visage aimé, puis perdu. Promenades. Arles, le Rhône, et puis les cimes, mes chères Pyrénées. Tous ces lieux, certes, j’y reviendrai. Mais à ces moments ?
De dos, je la vois jouant. Blonde, son corps rythmant les sons. Retourne-toi, que je continue mon rêve. Oui, belle sans doute derrière ses lunettes de soleil. Et jeune, jeune surtout, alors que je me fais, ou défais, vieux. Elle rejoint d’autres visages encore, entrevus et non interpellés, dans le silence de mes fictions.
Certes elle aussi vieillira. Ce qu’elle deviendra évidemment je n’en sais rien. Mais que d’êtres j’ai aimés qui ne l’ont jamais su !
L’avenir est clos. A-t-il jamais été ouvert depuis mon enfance ? Ai-je jamais touché les choses ?
La musique, elle, me touche et me réduit. D’autres, elle les séduit. Voudrais-je être à leur place. Sans doute non.
Ils s’amusent ou s’étourdissent, je ne sais. Libre à eux bien sûr. Éparpillez-vous donc, je descends dans mon abîme. Tel, immobile et solitaire, l’épervier se moque des moineaux qui piaillent.
Mais la musique éclate plus fort, éclaboussant mon deuil. Elle rejoint tels rares moments déjà connus d’éternité, et aussi de silence. Je dois fermer les yeux et cesser de penser. Ce n’est plus de moi qu’il est question. Comme si à tel niveau d’intensité il convenait de s’abolir, comme si au fond rien n’avait d’importance.
 
 © M.T. - juillet 2010