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acchus est un dieu bon, il délivre l’esprit de l’ankylose de la logique. Aussi bien je ne m’étendrai pas sur la réalisation de cette photo. Qu’il me suffise de dire qu’elle juxtapose des parties d’un même cliché représentant des iris en fleurs, chacune ayant subi une distorsion.
Qu’on voie double, ou triple, comme sous l’effet d’une boisson alcoolisée, peu importe ! Il y a une magie dans la diplopie, comme dans le kaléidoscope. Pourquoi condamner l’hallucination comme perception fausse ? La perception ordinaire n’est qu’une hallucination vraie.
L’ivresse vient du mouvement. Tous ceux qui ont été sur un manège de fête foraine me comprendront. La tête tourne, dit-on. Le fait-elle aussi quand on regarde cette photo ? Je ne sais... Mais en tout cas où veut-on en venir ici ?
À l’art baroque chez nous, à quoi me fait penser cette image. Sa novation a été le mouvement, le dynamisme. Avant lui les figures sculptées ou peintes étaient rigides, immobiles. Et avec lui tout s’est mis à bouger, à tourner et virevolter, dans tous les sens.
Robes mouvantes, envols de tissus, formes vaporeuses, ennuagées, je vous revois bien ici. Ainsi telle Assomption de la Vierge entourée d’angelots papillonnants. Et le ciel sur la terre...
Je ne sais si comme on l’a dit (ceux qui savent) le baroque est signe d’une angoisse corrélée à une fragilisation de la foi religieuse, après des siècles de certitude médiévale. Non vraiment, devant ma photo je pense à une fête. Je n’y vois rien d’angoissant.
N’ayons pas peur des gens raisonnables. La sagesse est le vice des vieillards, et qui vit sans folie n’est pas si sage qu’il croit. Emportons-nous dans l’ivresse ! Dansons, soyons vivants ! Aussi bien à la fin la musique s’arrêtera, et pour toujours.