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ne plante poussant sur un toit... En pastichant Robert Desnos, je dirais volontiers que ça n’existe pas ! Et pourtant, toujours en pensant à la fin de sa comptine, j’ajouterais : Et pourquoi pas ?
En tout cas je viens d’en voir deux démonstrations, sous forme de deux touffes fleuries, installées sur mon toit, et apparemment y prospérant. Elles sont le résultat de la germination hasardeuse de graines poussées par un vent tout aussi aléatoire. Mais c’est un fait que les voilà bel et bien. Quelle leçon vont-elles me donner, par exemple quant au fonctionnement de ma pensée ?
Nous pensons comme improbable un événement qui pourtant arrive. C’est que notre pensée se borne à un horizon fort restreint, et n’opère qu’une infime section dans l’infini des possibles. Nous taillons, émondons, fidèles au double sens de putare en latin : tailler et penser. C’est sans doute nécessaire dans la vie pratique, où il faut se fixer des buts et envisager les moyens de les atteindre, en éliminant toutes considérations adventices, qui nous en détourneraient. Mais quant aux grandes décisions, qui peuvent engager tout l’être, il faut se méfier de ces sélections arbitraires que nous faisons d’habitude. Le champ de notre mental ne doit pas être ainsi rétréci. Efforçons nous d’ouvrir l’horizon, d’aller vers la Grande Image, et sinon d’y accéder, au moins d’en reconnaître l’existence.
La Grande Image, dit Lao-Tseu, n’a pas de forme. C’est-à-dire qu’elle n’est jamais réductible à une seule de ses manifestations. Elle change sans cesse. Le Tao qu’on saurait nommer n’est pas le Tao de toujours. Les termes vraiment termes ne sont pas les termes constants.
Fort de ces illustres leçons, je me promets donc de faire à l’avenir dans ma pensée la part de l’improbable. Dans la vie on ne sait jamais, ou jamais on ne sait. – Maintenant tiendrai-je probablement cette résolution ? Qui sait ? Peut-être... Quizás, quizás, quizás...