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epuis toujours j’ai voulu connaître les choses. En pensant l’éclaircir je me suis protégé de la vie derrière une forteresse de livres. Qu’en ai-je retiré ?
Certes une certaine capacité à bien figurer sur le Grand Théâtre, à séduire à peu de frais des auditoires consentants, à porter le masque qu’on attendait le moi, à jouer le rôle d’un histrion du savoir. Mais qu’ai-je appris ?
J’ai perdu sans doute la fraîcheur du regard de l’Enfant, sa capacité à s’étonner de tout, son absence totale de pose, d’hypocrisie. Je sens maintenant le besoin non pas de retrouver tous ces dons – ce n’est pas possible, car Chronos a dévoré celui qui les possédait –, mais d’apprendre à nouveau à simplement regarder les choses. Devant elles je dois retrouver ce que j’ai connu il y a bien longtemps, et perdu ensuite : l’Émerveillement.
Maintenant, quand je pense à mon armée de livres, il me semble que leur fréquentation n’a fait qu’augmenter mon scepticisme sur leur contenu. Mais j’ai dû quand même en passer par là, et je les remercie de m’avoir au moins appris l’incertitude. Car qui ne sait rien de rien ne doute :
La vanité de tout savoir
Se mesure au fil des journées
Et plus s’écoulent les années
Plus simple se fait le regard.
On a cru comprendre les choses
Elles défient l’esprit subtil,
Aucun livre profond fût-il
Ne vaut un vase où l’œil se pose :
Le cadeau d’une vie austère
Dans le contrejour est pareil
À l’apparition d’un soleil
Tout éblouissant de lumière...
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Cette photo et ce texte sont extraits de mon ouvrage autobiographique Instants de lumière. On peut le commander directement sur le site de l'éditeur BoD. Pour plus de renseignements, cliquer sur l'image ci-après :
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