L |
es étés de mon enfance m’ont marqué à jamais. La chaleur en était accablante dans mon village languedocien. La journée, nous vivions dans une quasi-obscurité, qui était incompréhensible aux touristes venus du Nord. Mais ils ne connaissaient pas cette torpeur stupéfiante, meurtrière de toute réaction, qui peut nous frapper aux heures chaudes. Ils ne savaient pas que ce Soleil même dont ils recherchaient la lumière peut être pour un homme du Midi l’image d’un destin implacable : Mireille est morte d’insolation en traversant la Crau.
Du soleil alors j’ai souvenir de seuls rais de lumière filtrant au-travers des volets. On y pouvait tout imaginer. La chambre où nous recevions l’ordre de faire la sieste, mon frère, mon cousin et moi, se peuplait, la puberté aidant, de mille visions et fantasmes. Qu’y avait-il derrière ces interstices en eux-mêmes éblouissants ? Maintenant, je pense que ce type d’interrogation me constitue. Je ne crois certes pas aux grandes et définitives révélations, et je me méfie de ceux qui en font état et profession. Mais enfin il est pour moi des moments où le temps s’arrête, et laisse entrevoir l’éternité. Et dans l’éblouissement de ces instants, je sens le début d’une justification d’être.
Le soleil ne peut se voir en face. Et non plus Dieu. Je ne sais s’il faut mourir pour voir Celui auquel je ne crois pas. Qu’il me suffise, dans l’obscurité de cette vie, de cultiver mes éternels instants. Ce sont les clairières de l’Essentiel :
Volets mi-clos
Soupçons brûlants
Dans l’été chaud
Dehors dedans
Tant de lumière
Qui nous consume
Et de mystère
Qui nous résume...
*
Cette photo et ce texte sont extraits de mon ouvrage autobiographique Exil. On peut le commander directement sur le site de l'éditeur BoD. Pour plus de renseignements, cliquer sur l'image ci-après :
> On peut aussi se procurer l'ouvrage en librairie, ou sur les sites de vente en ligne.