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illons tracés sur le sable marin par la lumière au crépuscule... Mais quel écho, quelle résonance cette description a-t-elle dans notre âme ? Quel intérêt d’identifier seulement une chose, si elle ne nous parle pas ? Et que dire d’un chemin qui nous laisserait à l’arrivée tel que nous étions quand nous sommes partis ? Qui ne soit pas aussi un cheminement à l’intérieur de nous-mêmes ?
Nos vies sont mêlées, impures. On voudrait certes qu’elles ne soient faites que de moments parfaits, d’instants de plénitude. Mais non. Vient très vite la prose de la vie, avec son sordide cortège. Mesquineries et médiocrités sont notre lot. Quotidiens coups d’épingle dans la pelote...
Je pense à Icare, qui ne l’a pas accepté, quand il s’est approché du soleil, le dispensateur de Lumière. Il voulait que sa vie fût toujours poétique. Mais ses ailes ont fondu, et il s’est abîmé dans la mer, où il s’est noyé. Son exaltation a été punie. On ne peut pas impunément vouloir étreindre les nuées.
Faute d’exaltation alors, nous nous banalisons, et nous en venons même à aimer notre déchéance, car l’appel d’autre chose que ce que nous connaissons dans nos pauvres vies nous est trop pénible à supporter. Nous fermons les yeux, et meurtriers de notre âme aux objets répugnants nous trouvons des appâts.
... Mais même si de la Lumière initiale nous n’avons plus que des traces, elles nous montrent la voie, nous pouvons les suivre, les conserver au fond de nous-mêmes comme de précieux viatiques. Ce sont nos provisions de route spirituelle. D’instants passés qui nous les ont fait voir (et ils passent toujours) nous avons au moins le souvenir. C’est lui qui garantit l’avenir.
Ces traces si précieuses, sachons les regarder, et les garder. À les suivre dans cette photo, peut-être mènent-elles à un Enfant jouant sur la plage, dans l’éternelle lumière du soir. Celui-même que nous avons été, que nous sommes encore malgré nos reniements et nos trahisons...