À regarder cette image, je vois moins le sujet lui-même (vagues léchant un rivage) qu’un combat de la lumière et de l’ombre. Je songe à celui, en nous, de l’esprit qui met en ordre, et du désordre qui toujours menace. Et je me souviens que dès la Genèse la manifestation du premier est un appel à la venue de la lumière : Fiat Lux ! – Que la Lumière soit ! Cette lumière, qui doit conjurer le chaos ou le tohu-bohu du monde, n’est pas la lumière que nos yeux voient, mais une lumière intérieure, mentale.
Lux... Le mot latin l’exprime bien : c’est une lumière qui n’a pas de source physique assignable, à la différence de lumen, qui se dit d’une lumière dont on voit l’origine, comme une bougie, ou une lanterne. Les yeux, qui la reflètent, sont appelés des lumina.
Je me souviens aussi que dans la Genèse même le soleil et la lune ne sont créés que bien après l’injonction à la venue de la lumière, à laquelle on ne comprend rien si on n’en tient pas compte. Ce sont comme dit la Vulgate des luminaria, des luminaires (un grand et un petit) qui vont désormais marquer les journées et les nuits.
Il y a donc deux lumières, l’intérieure et la physique. Un aveugle même dit Je vois pour dire Je comprends. Est-il meilleur exemple de la différence ?
D’autres bien sûr verront tout autre chose dans ma photo. Mais qu’est-il interdit de projeter dans une image ?
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Cette photo et ce texte sont tirés du tome 1 de mon ouvrage Petites méditations photographiques, édité chez BoD. Il est disponible en deux formats, papier et numérique (e-book). On peut en feuilleter le début en cliquant ci-dessous sur Lire un extrait. On peut le commander sur le site de l'éditeur en cliquant sur Vers la librairie BoD. Il est aussi disponible sur commande en librairie, et sur les sites de vente en ligne.