La Fin des choses

Je continue la publication ici d'une série de Méditations photographiques, qui seront plus tard publiées en volume.

Dans la vie semble-t-il les choses ne sont intéressantes que dans leur début ou dans leur fin. Tout ce qui commence bénéficie de l’anticipation du rêve et de l’attente, et tout ce qui finit s’accompagne, avec quelque mélancolie mais non sans quelque douceur aussi, du souvenir qui va suivre. Sur ce compagnon on pourra compter, fidèlement il sera là, et quant à ce que nous avons vécu le rappel qu’il en fera nous consolera de sa perte. Si besoin est du moins, car la transfiguration de la mémoire compense bien souvent l'insignifiance de la vie.

Pourquoi l’automne serait-il si beau, sinon parce qu’il incarne ce qu’est toute fin : un adieu nécessaire à la vie exubérante, et elle sitôt disparue une invitation à s’en souvenir, donc à en recueillir au fond de soi une trace merveilleuse ? Certes cet adieu est momentané, mais à voir ici comme pour la première fois le mordoré d’une feuille, on ne le sait pas. Bientôt pense-t-on viendra la nuit, simplement balancée, pour une intime et sans doute dérisoire éternité, par un seul jeu d’ombre et de lumière.

Modestes trésors, il suffit de les chérir. Ce sont nos viatiques. À eux nulle prière, mais en eux simplement confiance. Qui nous dit qu’au moment de tout finir et de fermer enfin les yeux, l’un d’entre eux ne s’imprimera pas sur nos paupières ? Nul ne le sait. En tout cas ce n’est assurément pas rien, pas plus que pour la nature mettre ses plus beaux atours avant de mourir.