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n nous a prévenus sans doute, pour nous édifier, qu’au terme de toute attente et de tout chemin s’ouvre une porte, et qu’il faut se tenir prêt à la franchir. Un Jugement peut-être se tient au-delà, qu’il faudra affronter avec une âme pure. Ou bien encore, pour nous consoler, on a pu nous dire qu’une issue sera donnée à nos peines, et que même si nous titubons maintenant dans le noir, une grande lumière plus tard nous éclairera dans laquelle nous nous fondrons.
Tout cela est bel et bon, mais cette photo conforte-telle ces enseignements ? Bien sûr on peut en voir un écho dans cette pièce très obscure éclairée en son fond par une seule porte : la pièce figurerait la vie dans ses obscurités, pourquoi pas un cachot, une prison, et la porte ouverte une issue finale aux vicissitudes de l’existence.
Mais rien de plus pour caractériser cette issue. En effet ce sur quoi ouvre la porte est une surface totalement blanche, qui ne dit rien en elle-même de ce qui pourrait justifier et alimenter nos espoirs ou nos craintes.
Cette surface blanche dans la photo s’explique d’ailleurs techniquement. L’appareil photographique en effet, à la différence de nos yeux qui compensent toujours, expose la lumière soit sur une zone, soit sur une autre. Si l’une est bien exposée (ici les pavés de la pièce), l’autre est surexposée jusqu’à être brûlée (ici le fond de la porte). C’est comme si la porte ouvrait, plutôt que sur une lumière disposée à notre intention, simplement sur une absence de choses, un rien ou un vide, si on veut.
Mais encore faut-il supporter que la vie débouche sur un Vide. C’est le cas du zen, par exemple, ou de la philosophie indienne de la maya, le rideau des apparences. Ce dernier écarté, la surface blanche est le but ultime, comme au cinéma, une fois les lumières rallumées, l’écran blanc ne porte aucune trace des péripéties du film.
Et si, derrière la porte, il n’y avait rien ?