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Le blog artistique de Michel Théron
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Un petit bonheur

Un petit bonheur

Méditations photographiques
D.R.

O

 

n aspire toujours à un grand bonheur, pur et sans mélange, et surtout permanent. Mais on s’abuse. Il n’y a que des instants de bonheur, l’ambition d’un continuum est chimérique.

Ce jour-là, j’ai vu et tout de suite photographié ce rayon de soleil frappant une de mes croisées. Cela a suffi pour éclairer ma journée. On dira que je me satisfais de bien peu. C’est vrai. Mais au moins cet instant magique a-t-il existé, découpé sur le fond obscur d’un néant auquel je l’ai arraché. À mes yeux, ce n’est pas rien.

Je laisse au grand nombre l’ambition d’un bonheur perpétuel, qu’ils comprennent bien souvent comme une addition de petits plaisirs. Mais ces derniers ne s’adres­sent pas à l’âme. Boire sans soif, faire l’amour sans amour, sont-ce là des choses épanouissantes ? Je les vois plutôt comme la satisfaction de démangeaisons ponctuelles, d’un éréthisme physique et animal : un vrai tonneau des Danaïdes. Alors, à côté de cela, mon coin de fenêtre peut paraître bien modeste, voire insignifiant. Mais je continue de l’appeler un petit bonheur, par la joie qu’il m’a apportée.

Ce dernier mot est d’ailleurs le terme propre. L’homme est fait pour la joie alors qu’il se contente la plupart du temps du plaisir et qu’il ne cesse d’aspirer au bonheur. On sait ce qu’est la joie : contempler un beau paysage ou un beau tableau, écouter une belle musique, etc. sont choses qui vont plus profond que fumer une cigarette ou goûter d’un bon plat. Il faut que l’âme, ou le cœur, soient associés aux sensations, et procurent ce déchirement, cette insatisfaction même et ce sentiment d’exil qu’on ne trouve que dans les grandes émotions.

Si le grand bonheur vanté par mes contemporains n’est finalement pour eux que la perte de l’Idéal profond et de la Transcendance, force m’est de me rabattre sur le petit. Il me suffit, puisque je m’y sens effleuré, bien provisoirement, par leur aile réveillante.

*

Sur le sentiment d'exil dont il est question dans ce texte, voir mon ouvrage qui le développe (cliquer sur l'image ci-dessous) :

Cliquer sur l'image - D.R.