Résilience

e me suis toujours méfié des catéchismes encourageants et des discours uniquement positifs. Ils rassurent à peu de frais, et sans grande durée, sur une vie où rouille et dégradation l’emportent bien souvent.

Pourtant j’ai fait cette photo. Pourquoi ? Sans doute à cause du contraste maximal qu’elle présente entre le désert pierreux du fond, d’une aridité sans vie, et le rouge bien vivant au contraire du coquelicot au premier plan. – Mais bien sûr, ce n’est pas le seul jeu formel qui m’a intéressé. J’ai pensé à la vie qui peut surgir inopinément d’un lieu voué à l’abandon. Bref, et métaphoriquement, à ce qu’on appelle dans nos vies la résilience.

Longtemps je n’y ai pas cru, si grandes sont certaines détresses. Et puis avec le temps l’idée a fait son chemin en moi d’un sursaut toujours possible dans la vie. Au rebours de ce qu’on croit, on peut être plus accueillant à l’imprévu au fil des années, faire la part de l’inconnu, être moins catégorique et négatif que dans la jeunesse. Au moins est-ce que je vis...

Comment se redresser ? Faire étymologiquement sa résurrection ? Il me semble qu’on peut commencer par faire attention aux moindres choses qui nous entourent. On vit habituellement sans voir autour de soi. Et pourtant que de signaux y a-t-il, et, à nous adressées, que de paroles !

Portée par le vent, une graine a atterri au milieu des pierres. Et puis un jour, de façon tout à fait improbable, elle a germé, et la fleur est apparue. Elle disparaîtra au prochain hiver, mais elle renaîtra au printemps suivant : elle ne mourra pas.

Aléatoire est notre vie, la graine dont nous venons aurait très bien pu ne pas germer. Mais enfin nous sommes là, et quand nous disparaîtrons la Vie continuera. Que faire, sinon toujours respecter l’improbable, et ouvrir nos mains ?

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Cette photo et ce texte sont extraits du tome 2 de mes Méditations photographiques (BoD, éd.). Pour des renseignements sur cet ouvrage, cliquer sur l'image ci-dessous :