Mirage

ertaines photographies sont bien trompeuses. Qu’est ce qui empêche de voir ici un désert avec ses dunes, photographié d’en-haut par un avion, avec en fond, très loin, le trait bleu d’une mer ? Pourtant la prise de vue a été faite en photographie rapprochée, le premier plan ne se situant qu’à quelques centimètres du sujet. Les dunes ne sont en fait que les petites ondulations du sable sur une plage ordinaire, et ce qui les fait paraître des dunes est peut-être l’éclairage oblique du soleil couchant, ainsi que le souvenir de photos de désert du même genre. En outre la mer n’est pas si loin : elle paraît simplement ici fort lointaine du fait du cadrage qui diminue la hauteur de son trait, et de l’objectif grand angle.

Mais je ne sais si ces précisions techniques sont utiles au lecteur. Sans doute préfère-t-il rêver sur les images, et sans doute a-t-il raison. Au restaurant on goûte un plat, on ne s’enquiert pas forcément de sa recette.

... Imaginons-nous donc comme un explorateur dans un hostile désert de sable, assoiffé et trébuchant à chaque pas. Sous ses pieds, comme ennemie, l’ombre du premier plan. Mais le voici qui lève les yeux. Et que voit-il ? Le miracle de la mer salvatrice, qui le rafraîchira enfin. Sa vision lui permet d’avancer, car il entrevoit un terme à ses épreuves. Il se redresse donc, galvanisé par la force résiliente de ce qu’il devine.

Nous-mêmes ne sommes nous-pas animés d’une force semblable, quand telle fiction à laquelle nous donnons crédit nous permet de braver les épreuves de nos vies, et nous remet debout ?

Mais le marcheur en s’approchant pourra constater que le miracle de tout à l’heure n’est en réalité qu’un mirage, comme il arrive dans les déserts. Nous aussi pouvons être de même désillusionnés. Pourtant à ces visions on a cru un moment, et ce n’est pas rien. En vérité :

L’homme descend du Songe.

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