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Le blog artistique de Michel Théron
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Échappée bleue

Échappée bleue

D.R.

D’

 

un édifice en ruines (un château languedocien) j’ai photographié cette fenêtre, avec l’échappée qu’elle ouvre vers le ciel. Revoyant l’image, je me dis qu’un sens métaphorique peut s’y trouver, mais qui bien sûr, comme toujours, n’engage que moi.

En ruines aussi sont beaucoup de vies. Les causes en sont multiples, mais il me semble que la pire dévastation d’une existence est la destruction de ses rêves et de ses illusions. La ruine matérielle est certes effrayante, mais pas autant à mon avis que la ruine morale. Ce à quoi on a cru, ce autour de quoi on a construit et engagé toute sa vie, voici que maintenant on n’y croit plus. Peut-on imaginer un pire état ?

Les bien-pensants se pressent alors, qui à peu de frais conseillent et font la leçon. Les pires à mon avis sont ceux qui disent que l’épreuve a toujours un sens, qu’il faut l’assumer, la prendre sur soi, comme a pris une croix celui qui il y a longtemps est venu sur terre pour sauver les hommes. Ces paroles sont des insultes faites au vrai malheur. Et en outre on ne voit pas comment ajouter un malheur à un autre peut consoler en quelque façon.

Ou alors... Si l’on nous dit qu’à l’image du Sauveur des hommes nous devons nous-mêmes sauver notre âme ou nous sauver, on peut répondre qu’effectivement il convient de se sauver, mais non au sens d’assurer son salut : au sens de s’enfuir. – Et alors... Alors peut venir vers nous la belle échappée bleue de ma fenêtre en ruine, qui nous invite à nous enfuir nous aussi dans l’immensité céleste dont l’encadrement nous donne la vision et les prémices.

On considère chez nous que la fuite est une lâcheté. Les Stoïciens n’ont pas peu fait pour accréditer cette idée. Et pourtant c’est le contraire qui est vrai, dans bien des cas. La fuite peut être le seul moyen de survie qui reste, comme le jet d’encre de la seiche. Fuir l’absurdité de l’épreuve dans la nue des rêves, s’échapper dans l’échap­pée bleue, dans la folie azurée, qui pourrait le reprocher à celui qui n’a plus que cela pour survivre ?

 

***

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