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Le blog artistique de Michel Théron
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Le Grand Blanc

Le Grand Blanc

D.R.

À

 

la différence de notre œil, qui accommode sur les objets de façon pondérée en compensant naturellement les différences de luminosité qu’ils peuvent présenter, l’appareil photographique n’a pas cette latitude. Devant des zones très différemment éclairées, il expose correctement soit l’une soit l’autre. Et celle qui n’est pas choisie pour la bonne exposition est brûlée.

C’est le cas dans cette photo de porte, où j’ai choisi d’exposer correctement le verrou, et où par conséquent le fond, ce sur quoi ouvre la porte, est surexposé jusqu’à devenir tout blanc. Dans la réalité c’était un magnifique paysage panoramique de la Haute Plaine de Cerdagne, dans les Pyrénées Orientales. Nous n’en saurons rien, tant pis ! – Ou plutôt : Tant mieux ! Car je peux faire de cette limitation de l’appareil photo un avantage, qui me permet de développer certains aspects symboliques de ma photo.

Donc la Porte ouvre sur un Grand Blanc. Je ne sais pas si ce sera celui que nous verrons juste avant notre mort, comme l’ont suggéré ceux qui ont fait des expériences de mort imminente (NDE : Near Death Experiences). – Plus intéressante est la dimension métaphysique de ce Grand Blanc qui annule tout. On sait que pour l’Inde nous ne voyons que des apparences, la māyā, voile dont les dieux nous leurrent par jeu (līlā). Quand pour le méditant se déchire ce voile phénoménal, alors la réalité ultime apparaît entièrement vide. Comme au cinéma, à la fin du film, on ne voit qu’un écran tout blanc que les péripéties du film (coups de feu, d’épée, etc.) n’ont pas le moindrement altéré. Eh bien, quand nous nous réveillerons de l’illusion, notre Porte pourra s’ouvrir sur du Vide ou du Blanc.

Au reste ce dernier est supérieur à toute trace qui l’altèrerait, comme le tableau blanc, la page blanche sont évidemment supérieurs à toute détermination qui limiterait leurs possibles. Aussi bien puis-je conclure cette méditation par l’éloge du Blanc et du Silence. – Maintenant, c’est assurément un grand privilège que de ne rien peindre ou écrire. Mais peut-être ne faut-il pas trop en abuser...

 

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