Un calme profond

C’

est ce que je ressens en regardant cette image d’un lieu où souvent me mènent mes pas, et je voudrais qu’en moi s’installe durablement, au fil des jours qui me restent, l’atmosphère qu’elle m’inspire.

Chacun a je pense des motifs légitimes à être troublé. La vie n’épargne pas les déconvenues, il est rare qu’elle réponde entièrement à l’attente, au rêve qu’on s’en fait. Rancœur, aigreur nous envahissent, toutes émotions négatives qui nous emmènent bien loin de la sérénité. Et pourtant qui n’espère en cette dernière ?

L’eau sur cette photo est absolument calme, on n’y soupçonne pas de vent, les phragmites mêmes en premier plan (mes si chers et fidèles roseaux) ne semblent pas bouger. Les reflets des arbres sur les berges semblent plonger dans l’eau, y créer un effet de vitrail, de transparence plus ou moins diaphane, qui protège de la vie furieuse et séismique. Je pense à Rimbaud : « Au bois, il y a une cathédrale qui descend et un lac qui monte. » Tout est harmonieux et surtout permanent, ignorant le mouvement qui déplace les lignes.

Je dois prendre modèle sur cette image, la voir au fond de moi comme mon icône, l’image qui me correspond le mieux, et entrer dans la dimension d’éternité qu’elle contient. Bien sûr j’ai comme tout le monde mon cortège de troubles. Mais ce fardeau, il est temps de le reposer, et de se reposer, en suivant peut-être la promesse évangélique : Je donnerai le repos à vos âmes. Et à l’inverse de ce qu’on nous a enseigné bien souvent, ce n’est pas plus tard mais dès maintenant qu’il faut goûter au calme profond et se sentir vivre vraiment. L’important n’est pas qu’il y ait une vie après la mort, mais qu’il y en ait une avant.

Mon icône m’invite à me mettre à l’écoute de ma respiration. C’est en moi comme le mouvement de la mer, qui lente va et lente revient. Alors à l’écoute du Souffle progressivement les souvenirs anciens lentement de désancrent, ils viennent vers moi dans la lumière. Le temps s’arrête, et l’éternité s’installe. Nouveau Nicodème, je nais à nouveau, vivifié, dans les profondeurs du calme.

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Ce texte est tiré de mon livre Quand parlent les images, publié chez Amazon (2025), et commandable sur son site :