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ous avançons souvent dans la vie avec assurance, convaincus de la solidité de notre position. De tout ce que nous avons conquis et acquis à la force de notre énergie, nous pensons que rien ne peut nous être enlevé. Nous sommes si valeureux ! L’image que nous avons de nous-mêmes, et que nous renvoient si obligeamment les autres sur le Grand Théâtre où se joue la comédie du monde, nous conforte dans cette croyance.
Mais avons-nous raison de le faire ? Qui nous dit qu’à la moindre occasion fortuite (ou que nous pensons telle) nous ne trébucherons pas ? À l’image de la lézarde menaçante de cette ombre projetée au sol, peut à tout moment se fissurer notre personnalité sociale, et apparaître la fragilité de tout notre être profond. Acteur, hypocrite (c’est le même mot), vois maintenant ce qui reste de ton Masque !
Pour arriver où nous en sommes, il nous a fallu faire beaucoup de choix. Et donc refuser beaucoup de possibilités, qui d’avoir été repoussées n’ont pas cessé d’exister. Simplement elles ont été refoulées au fond de nous-mêmes, constituant une Ombre de plus en plus épaisse à mesure que les choix se sont faits plus nombreux. Elle est la part non choisie de tous nos choix. Quoi d’étonnant alors à ce que nous devenions à telle ou telle occasion inattendue la proie pour l’ombre ?
Aussi nous aurons beau nous agripper à telle barrière, comme celle de la photo, son ombre zigzagante sur le sol peut signifier ce qui nous attend, si nous n’y prenons pas garde : une chute de tout notre haut. La statue indestructible que nous pensons être a des fondations bien fragiles, et peut à chaque instant être détruite. Le Colosse a des pieds d’argile, à la merci du moindre choc.
... Aurons-nous un jour la sagesse de jouer notre rôle social avec distance, avec la conscience que ce n’est qu’un jeu ? De faire comme si ? D’une simple estrade le bateleur ne tombe pas de bien haut...