Le Pas de côté

ette route, j’y suis passé bien des fois sans rien remarquer de particulier. Pourtant un jour j’ai aperçu dans le fossé qui la borde ces quelques épis en contre-jour, dont j’ai consolé la modestie par un cadrage rapproché qui les fait mieux voir. Mais pour cela j’ai dû abandonner l’asphalte, me mettre au niveau du fossé, et donc faire un pas de côté.

Ce pas de côté, il faut le faire dans nos vies. On ne peut pas toujours agir, lutter, rivaliser, avoir pour seul but de s’affirmer soi-même et pour cela étrangler quotidiennement son voisin. De toute façon, de combien de reniements se paient les ascensions !

La contemplation attentive des moindres choses permet d’y voir l’infini et d’y connaître l’éternité. On s’abreuve là à une Source autrefois connue et qui semble maintenant oubliée, mais qui est celle-là même du regard de l’enfant qu’on a été et qu’on porte toujours en soi. Son regard était franc, direct et toujours émerveillé, et même pour des prunes, alors que celui de l’adulte est brouillé par les faux buts et les faux projets.

Appliquons-nous à simplement regarder ce qui est devant nous. Peu de gens savent le faire. Ils sont endormis, ils ne connaissent pas cette fulgurance de l’instant présent, où dans l’abolition de tout le reste l’on trouve une réconciliation avec qu’on est vraiment :

Promeneur qui souvent sommeilles
Reclus en toi,
N’oublie pas de voir les merveilles
Que tu côtoies.

Modestes sont mais précieuses
Pour toi passant :
Nourris ton âme merveilleuse,
Tant qu’il est temps.

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Ce texte est tiré de mon livre Quand parlent les images, publié chez Amazon (2025), et commandable sur son site :